À Abou Dhabi, Mercedes-Benz vient de franchir un cap que personne n’avait réellement anticipé : transformer la Classe S, symbole reconnu du luxe automobile, en taxi autonome de niveau 4. Derrière cette annonce faite début décembre 2025, un partenariat ambitieux avec Momenta et Lumo qui vise à créer le premier véritable service de robotaxis haut de gamme. Une expérimentation inédite qui pourrait redéfinir la place des constructeurs dans l’écosystème de la mobilité autonome, et repositionner Mercedes face aux géants technologiques.

La nouvelle est tombée le 9 décembre 2025 et elle a instantanément attiré l’attention du secteur : Mercedes-Benz déploiera des robotaxis autonomes basés sur sa Classe S à Abou Dhabi, en partenariat avec Momenta, spécialiste chinois de l’IA embarquée, et Lumo, opérateur local dédié aux services de mobilité autonome. Si vous pensez que le choix de l’Émirat est un hasard, vous vous trompez. Abou Dhabi s’impose depuis deux ans comme l’un des environnements réglementaires les plus permissifs et les plus proactifs au monde en matière de véhicules autonomes. Les autorités y multiplient les déploiements pilotes, et pléthore d’acteurs y testent déjà des flottes de robotaxis. Pour Mercedes, qui a déjà marqué les esprits en homologuant le premier système de conduite autonome de niveau 3 sur route ouverte, cette nouvelle étape ressemble à une déclaration d’intentions. La marque allemande ne veut plus seulement participer à l’avenir de la mobilité, elle veut le définir dans le segment le plus premium. Un tour de force inédit dans ce secteur.
L’annonce illustre surtout un changement stratégique profond. Ces dernières années, la plupart des services de robotaxis ont privilégié des véhicules dédiés, souvent compacts, utilitaires, parfois volontairement dépouillés pour réduire les coûts opérationnels. Mercedes prend la direction inverse : offrir une expérience haut de gamme, au calme, dans une Classe S bardée de capteurs, opérée par un système autonome de niveau 4 reposant sur le logiciel de Momenta. L’objectif est clair : apporter à la mobilité autonome la qualité d’expérience que les utilisateurs fortunés attendent d’un véhicule avec l’étoile, même sans chauffeur. La marque à l’Etoile promet une perception de l’environnement d’une précision millimétrique grâce au combo caméras, radars et LiDAR, et une circulation fluide dans les environnements urbains complexes grâce au modèle d’IA de Momenta, conçu pour analyser en permanence des situations dynamiques à très haute vitesse de traitement.
La Classe S, redéfinie
À travers cette initiative, Mercedes repositionne la Classe S dans un rôle totalement nouveau. Ce n’est pas qu’un taxi, c’est un espace mobile de haute technologie capable de rendre obsolète la présence d’un conducteur humain. La marque a toujours fait du confort, du silence et de l’ergonomie une marque de fabrique, mais l’intégration complète d’un système autonome de niveau 4 transforme l’expérience en profondeur. Le trajet devient un moment suspendu, à l’abri des contraintes, sans aucune intervention humaine, dans une voiture pensée pour se piloter seule avec une précision supérieure à celle d’un chauffeur professionnel. Dans un contexte où le marché du robotaxi souffre encore de défis économiques majeurs, Mercedes veut prouver qu’une offre premium peut générer de nouveaux modèles de revenus, en particulier dans des régions où la demande pour des services exclusifs est très forte.
Lumo, partenaire opérationnel du projet, va jouer un rôle absolument clé dans cette démonstration. La société émiratie, spécialisée dans les services de mobilité autonome haut de gamme, sera responsable du déploiement, de la gestion des trajets et de la maintenance des véhicules. Pour Abou Dhabi, l’arrivée d’un robotaxi luxueux signé Mercedes renforce la stratégie de l’Émirat : devenir la vitrine mondiale des déplacements sans conducteur. Après l’introduction de robotaxis 100 % autonomes via le partenariat Uber–WeRide fin 2025, l’Émirat ajoute désormais une brique premium à son écosystème, un segment sur lequel aucun autre pays n’avait encore réellement misé.
Un marché où Mercedes défie les géants
Le projet prend d’autant plus de relief que Mercedes se positionne dans une dynamique concurrentielle inédite. Jusqu’ici, le marché du robotaxi était dominé par les géants de la tech, Waymo en tête, suivi par Cruise, WeRide ou AutoX. Tous partagent une vision centrée sur la technologie avant tout. Avec l’arrivée de la Classe S autonome, Mercedes s’attaque non seulement à ces acteurs, mais ouvre un nouveau sous-segment : celui du robotaxi de luxe, pensé non comme un service utilitaire, mais comme un produit à forte valeur ajoutée conçu par un constructeur automobile historique. La différence est notable. Mercedes veut offrir une expérience de déplacement unique, mémorable et s’inscrivant comme une référence du genre.
L’annonce du 9 décembre 2025 précise que le déploiement opérationnel commencera en 2026, après une phase d’essais et de validation réglementaire. L’Émirat, déjà équipé d’un cadre juridique avancé sur les véhicules autonomes, devrait accélérer ce processus. Les essais permettront de tester la résilience du système Momenta dans des conditions aussi variées que challengeantes, notamment face aux flux de trafic très hétérogènes d’Abou Dhabi, où cohabitent hypercars, taxis, véhicules de livraison et utilisateurs touristiques. Ce terrain réel constitue un laboratoire idéal pour perfectionner la conduite autonome de niveau 4 dans un cadre exigeant mais stable.
Une alliance stratégique qui rebat les cartes
Le partenariat entre Mercedes, Momenta et Lumo dépasse largement le simple lancement d’un service. Il préfigure un changement de paradigme pour les constructeurs. Pendant des années, face aux progrès fulgurants des entreprises technologiques, beaucoup d’industriels ont mis en pause leurs ambitions d’autonomie avancée ou se sont contentés d’intégrer des systèmes fournis par des entreprises tierces. Mercedes, elle, semble vouloir revenir dans la partie, notamment grâce à l’expertise logicielle de Momenta. Cette alliance stratégique entre un constructeur premium, un spécialiste de l’IA chinoise et un opérateur local d’un marché très exigeant crée une combinaison rare.
Le déploiement à Abou Dhabi sert également de test grandeur nature pour évaluer la viabilité économique d’un robotaxi premium. Là où de nombreux projets de taxis autonomes peinent à atteindre la rentabilité en raison de coûts opérationnels élevés, l’approche de Mercedes pourrait inverser la logique. Une Classe S robotisée vise un public disposant d’un fort pouvoir d’achat, prêt à payer pour une expérience unique, ce qui ouvre potentiellement la voie à un modèle économique plus soutenable. Le marché des Émirats, historiquement orienté vers les offres haut de gamme, constitue un terrain parfait pour ce type de démonstration.


Le niveau 4, une démonstration technologique
Ce projet est aussi une vitrine du savoir-faire de Mercedes en matière de conduite automatisée. La marque a été la première au monde à obtenir une homologation pour une conduite autonome de niveau 3 sur route ouverte, avec son système Drive Pilot. L’arrivée du niveau 4, même limité à des zones prédéfinies, pousse cette maîtrise un cran plus loin. Là où le niveau 3 nécessite encore que le conducteur reprenne la main dans certaines conditions, le niveau 4 permet au véhicule de circuler totalement seul. La société allemande veut montrer qu’elle est capable d’intégrer des briques technologiques bien plus ambitieuses que ce que ses systèmes actuels laissaient imaginer, surtout en termes de perception de l’environnement et de prise de décision algorithmique.
En choisissant Abou Dhabi, Mercedes anticipe également les futures évolutions du marché. L’Émirat est engagé dans une stratégie de diversification économique fondée sur la technologie, l’innovation et la mobilité durable. Les infrastructures y sont modernes, les routes larges et les autorités volontaires. Pour un constructeur, c’est l’assurance de tester un robotaxi dans les meilleures conditions possibles, loin des environnements urbains plus chaotiques et réglementairement contraignants d’Europe ou des États-Unis. Le projet permet ainsi à Mercedes de se positionner rapidement sur un segment ultra-stratégique sans subir les lenteurs administratives des marchés occidentaux.
Une ambition qui commence à Abou Dhabi
Les perspectives ne s’arrêtent pas à Abou Dhabi. L’annonce de décembre 2025 évoque explicitement l’ambition d’étendre ultérieurement le service à d’autres marchés. Cette expansion dépendra naturellement du succès de la phase pilote, mais témoigne d’une vision à long terme : Mercedes ne veut pas se contenter d’un coup d’éclat technologique, elle veut poser les jalons d’un réseau international de robotaxis premium. Cette ambition s’inscrit dans un contexte où les constructeurs cherchent à diversifier leurs activités, à monétiser différemment leurs technologies et à se positionner sur des services plutôt que seulement sur la vente de véhicules.
À travers cette initiative, Mercedes montre qu’elle n’entend pas laisser les géants de la tech dicter seuls l’avenir de la mobilité autonome. En misant sur un véhicule iconique, une technologie de pointe et un marché pionnier, la marque allemande transforme profondément la perception du robotaxi. Il ne s’agit plus seulement d’un outil de déplacement, mais d’un espace premium capable d’incarner une nouvelle forme de luxe. Abou Dhabi devient le point de départ d’une nouvelle ère, où l’autonomie ne sera plus seulement synonyme d’efficacité, mais d’expérience.
Sources : www.gulftoday.ae – www.heise.de – www.momenta.cn – www.arabianbusiness.com


















