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ExpertisesPublié le 08/08/2025
6 min

L’électrique française face au défi de la concurrence mondiale

La France mise sur le véhicule électrique pour assurer son avenir industriel et environnemental. En 2024, la production de véhicules électriques a bondi de 68 %, portée par des modèles emblématiques comme la Renault 5 électrique ou la Peugeot e-3008. Mais dans un marché dominé par la Chine et les États-Unis, l’industrie française doit redoubler d’efforts pour rester compétitive. Entre innovation, délocalisation et pression économique, l’industrie française du véhicule électrique est à un tournant.

Peugeot e-3008 électrique, SUV compact avec intérieur luxueux
Peugeot e-3008, SUV compact et véhicule électrique en France, alliant performance et confort.

Le gouvernement français a fixé un objectif ambitieux de 800 000 ventes de véhicules électriques par an d’ici à 2027, contre environ 300 000 en 2023. Cette évolution s’accompagnera d’un développement accéléré des infrastructures de recharge, avec un objectif de 400 000 points de charge installés d’ici à 2030. Pour inciter les consommateurs à franchir le pas, des dispositifs tels que le bonus écologique et le leasing social à 100 euros par mois ont été mis en place. Cependant, ces incitations sont progressivement réduites, signe que le marché doit devenir plus autonome.

Parallèlement, les constructeurs automobiles français investissent massivement pour proposer des véhicules plus performants, plus autonomes et accessibles à une clientèle plus large. Cependant, les défis à relever sont encore nombreux : prix d’achat encore élevé, coût des batteries, incertitudes sur les matériaux critiques, résistance de certains consommateurs aux nouvelles motorisations, etc.

Des investissements stratégiques pour une plus grande autonomie

Face à la dépendance de l’Europe vis-à-vis des importations asiatiques de batteries et de matériaux rares, la France s’est engagée dans une politique de souveraineté industrielle. Plusieurs gigafactories sont actuellement en construction, notamment dans le nord du pays, dans le but de produire des batteries localement et de réduire les coûts logistiques et environnementaux. À Dunkerque, un partenariat franco-chinois entre Orano (ex-Areva) et XTC New Energy Materials, annoncé en décembre 2024, prévoit de fabriquer des composants de batteries. Cette ambition, de 1,5 milliard d’euros, conçue au sein du projet NEOMAT, suscite à la fois des espoirs et des interrogations sur la dépendance technologique à l’égard de la Chine.

Carte de France montrant les emplacements des futures gigafactories de batteries électriques
Carte indiquant les sites prévus pour les futures gigafactories de production de batteries électriques en France

Les matières premières sont également un enjeu majeur. La transition énergétique dépend en grande partie des métaux rares tels que le lithium, le cobalt et le nickel, dont l’extraction est très concentrée dans quelques pays, notamment en Amérique du Sud et en Afrique. Pour sécuriser ces ressources, la France et l’Europe cherchent à diversifier leurs approvisionnements et à investir dans des projets de recyclage des batteries usagées.

Une concurrence internationale féroce

Si l’électromobilité en France progresse, elle doit faire face à une concurrence intense. Tesla, avec son usine de Berlin, inonde le marché européen et domine les ventes avec son modèle Y, devenu la référence en matière de SUV électrique grâce à son autonomie, ses performances et son réseau de recharge ultra-développé. Cette implantation locale permet à la marque d’Elon Musk d’éviter les droits de douane et d’accélérer ses livraisons en Europe, renforçant ainsi sa position dominante.

De son côté, la Chine, malgré les restrictions françaises sur les aides aux véhicules produits hors d’Europe, s’impose avec des marques comme BYD et MG Motors. Ces constructeurs misent sur des prix très compétitifs et des technologies avancées, notamment en matière de batteries et d’efficacité énergétique. BYD, qui développe ses propres batteries lithium-fer-phosphate (LFP), bénéficie d’un avantage stratégique en réduisant ses coûts de production et en offrant des modèles performants à des tarifs attractifs. La technologie Blade Battery offre aujourd’hui des capacités de 61,44 kWh et 80,64 kWh, permettant une autonomie comprise entre 433 et 552 kilomètres selon le cycle d’homologation européen WLTP. MG Motors, sous contrôle chinois, séduit également avec des véhicules bien équipés et accessibles, renforçant ainsi la pression sur les constructeurs européens qui peinent à rivaliser sur le segment de l’entrée et du milieu de gamme.

L’industrie française cherche à se distinguer par la qualité de ses véhicules et leur intégration dans un écosystème énergétique national. Le gouvernement soutient cette démarche à travers le plan France 2030, visant à produire deux millions de véhicules électriques par an en France d’ici à 2030, en maîtrisant des technologies de pointe telles que les moteurs électriques et les batteries. Produire des véhicules plus abordables est un des enjeux majeurs. Plusieurs projets visent à développer des modèles à moins de 20 000 euros, tout en garantissant une autonomie et une durabilité satisfaisantes. Par exemple, Renault prévoit de commercialiser, en 2026, une version électrique de la Twingo à un prix inférieur à 20 000 euros.

Station de recharge publique pour voitures électriques sur parking
Station de recharge publique pour véhicule électrique en France sur parking

Un rôle clé des politiques publiques

Pour soutenir l’industrie tout en accélérant la transition écologique, les subventions à l’achat de véhicules électriques seront progressivement réduites, passant de 1,5 milliard d’euros à 1 milliard d’euros d’ici à 2025. Dans le même temps, des taxes plus strictes sur les véhicules à combustion interne sont mises en place pour encourager les consommateurs à passer aux véhicules électriques.

La France investit dans le recyclage des batteries pour limiter l’impact environnemental et réduire sa dépendance aux importations de métaux rares. Des entreprises comme Verkor et Northvolt développent des solutions innovantes pour récupérer le lithium, le cobalt et le nickel, réintégrant ces matériaux dans de nouvelles batteries.

En misant sur l’économie circulaire, l’objectif est de sécuriser l’approvisionnement, diminuer l’empreinte carbone et renforcer l’autonomie industrielle. Ces initiatives s’inscrivent dans une stratégie plus large visant à rendre la mobilité électrique plus durable et compétitive.

Rendre la transition plus accessible

Le développement de l’électromobilité en France ne doit pas se faire au détriment de l’accessibilité des ménages modestes. Le développement d’une gamme de véhicules à bas prix et l’extension du réseau de recharge, y compris dans les zones rurales, sont des priorités. Les véhicules électriques doivent également être intégrés dans un cadre plus large de mobilité durable, incluant le covoiturage et l’amélioration des transports publics.

Un autre enjeu majeur réside dans la formation des professionnels et l’adaptation des infrastructures. L’installation de bornes de recharge doit être accélérée dans les copropriétés et sur l’espace public, tandis que les garagistes et techniciens doivent être formés aux spécificités des véhicules électriques pour accompagner leur déploiement à grande échelle.

Les prochaines années seront cruciales pour déterminer si la France réussira à s’imposer comme un acteur majeur du véhicule électrique en Europe. Avec des investissements stratégiques, une politique industrielle ambitieuse et une adaptation aux besoins des consommateurs, l’industrie automobile française a une carte à jouer dans cette transition mondiale.

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