Alors que Bruxelles discute d’un assouplissement de la fin du thermique en 2035 et que l’Asie domine 80 % du marché des batteries, Verkor inaugure à Dunkerque sa gigafactory de 16 GWh : un acte de foi dans la souveraineté industrielle européenne, ou un risque démesuré ?

Le 11 décembre 2025, sous le haut patronage d’Emmanuel Macron, la startup française franchit une étape décisive avec sa première usine de batteries, au cœur de la “vallée de la batterie” des Hauts-de-France. 100 000 m², 1 200 emplois directs et 3 milliards d’euros levés : Verkor mise gros pour équiper l’Alpine A390 dès 2026 et viser 50 GWh d’ici 2030.
Une inauguration sous haute tension
« C’est un grand jour pour Dunkerque, la France et l’Europe », lance Patrice Vergriete, président de la Communauté urbaine de Dunkerque (CUD), lors de la cérémonie du 11 décembre. L’événement se tient sous le haut patronage du président français, aux côtés de ministres et élus locaux. L’usine de Bourbourg abrite déjà les premières lignes de production en phase test, avec des cellules LFP-NMC destinées aux véhicules électriques premium.
Les chiffres impressionnent : capacité initiale de 16 GWh/an, soit l’équivalent de 200 000 à 300 000 batteries de VE par an. Le financement de ce projet est sécurisé à hauteur de 3 milliards d’euros par plusieurs acteurs : État français, BEI, Région Hauts-de-France, Renault, Mercedes, pour un investissement total visé à 11 milliards d’ici l’extension à 50 GWh. Verkor s’inscrit dans l’écosystème des Hauts-de-France, aux côtés d’autres acteurs batteries.

Le rôle dans la filière française
Verkor s’inscrit au cœur de la “vallée de la batterie” des Hauts-de-France, troisième gigafactory européenne après celles de Billund et Kamenz. Son partenariat avec Renault est clé : les premières livraisons de cellules alimenteront l’Alpine A390.
L’innovation vient de Grenoble (R&D Verkor), la production de Dunkerque (proximité des ports pour l’apport en lithium). EDF participera également à fournir une électricité verte à l’usine. En effet, un contrat de 33 MW a été signé et un partenariat avec Veolia est également convenu dans le but de recycler les batteries en fin de vie.
Les défis : compétitivité et timing
La montée en cadence reste le vrai test. Les phases pilotes ont commencé en avril 2025, mais la production industrielle n’est prévue qu’en 2026. Les coûts énergétiques pèsent lourd : malgré le PPA EDF (contrat d’achat d’électricité à long terme), l’électricité française reste chère face à la Chine.
Sécuriser les matières premières (lithium, nickel, cobalt) est un autre écueil, dans un marché tendu. L’extension à 50 GWh dépendra de nouveaux financements et de la demande européenne. Verkor parie sur sa techno LFP-NMC haute densité.
Contexte stratégique : Europe en questionnement
L’inauguration tombe à pic, alors que Bruxelles discute d’un assouplissement de la fin du thermique en 2035 (hybrides rechargeables tolérés sous conditions). En France, la SNBC (stratégie nationale bas carbone) mise sur deux tiers des ventes neuves en VE d’ici 2030, avec une prime à l’achat renforcée au 1er janvier 2026. Verkor incarne cette souveraineté : produire local pour éviter la dépendance chinoise.

Perspectives : succès ou mirage industriel ?
Les atouts sont là : la proximité avec les usines Renault/Alpine, la création de nombreux emplois (1 200 directs, 3 000 indirects), mais aussi un process bas-carbone utile. Si Verkor tient ses cadences, Dunkerque pourrait devenir le fer de lance d’une filière française compétitive.
Les risques persistent, notamment une demande en VE incertaine si Bruxelles cède sur 2035, des surcapacités mondiales, une guerre des prix asiatique. Malgré tout, Dunkerque symbolise le pari européen de souveraineté face aux concurrents étrangers.

















